Sous le casque d’un champion de France* se cache un Notaire heureux

Maître Remi Guillermin, notaire à Chalon-sur-Saône

Il était difficile d’envisager un entretien de visu, c’est par téléphone que j’ai mené cet interview. La voix chaude et posée de mon interlocuteur, un entretien calme, des réponses complètes et précises m’ont convaincue que j’étais en face d’un homme sur de lui mais sans forfanterie.

Qui êtes-vous maitre Guillermin?

J’ai 41 ans, je suis marié, j’ai 2 enfants, et installé comme notaire en 2007 dans l’étude familiale depuis 3 générations. J’ai fait mes études à Dijon puis à Lyon.

J’ai toujours été passionné de sport automobile. Malgré mon métier chronophage, je ne peux me passer de pratiquer ma passion pour la course.

Nous sommes 2 associés et une dizaine de collaborateurs.

Depuis quand êtes-vous sportif de haut niveau ?

A 23 ans, j’ai commencé les rallyes et les courses de côte comme co-pilote, jusqu’en 2005/2006, c’étaient des compétitions régionales et nationales, puis en 2007, j’ai commencé les courses en circuit fermé et disputé plusieurs éditions des rencontres Peugeot-sport, c’est un trophée de marque avec un niveau de pilotage très élevé. Et nous disputions aussi une course relais d’endurance pour ce même constructeur. Je courais sur 207 S16, puis sur 207 RC. Nous avons obtenu une 3e place en national (60 concurrents).

La transition s’est faite en 2013, lorsque nous avons commencé à disputer le Trophée Tourisme Endurance des berlines. C’est un championnat s’étalant sur 7 à 8 courses dans l’année, la durée de course variant de 4 à 8 h sur des circuits Français et Européens tels que Paul Ricard, Magny-cours, Navarra en Espagne, etc..

En 2013 je gagne le trophée national avec une 206 Peugeot, En 2014 et en 2015, avec une nouvelle voiture, la Seat Leon, je gagne le trophée 3, la catégorie des plus grosses cylindrées (350 Cv).

Nous sommes 3 pilotes dans l’équipe DMR et avons entre 3 et 6 assistants en logistique.

Nous sommes sponsorisés, mais c’est toujours compliqué de boucler le budget.

Les courses vont d’avril à novembre. A raison d’une par mois.

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Vos ambitions ?

Nous venons d’acheter une SEAT LEON cup racer, qui nous permettrait de disputer des courses de 24 h à Barcelone, Dubai ou Silverstone, cela nous tente beaucoup, mais cela demande aussi une logistique et un budget beaucoup trop importants pour l’instant.

Quelles sont les qualités requises pour gagner ces trophées ?

Tout d’abord, notre équipe de pilotes est très homogène, nous nous tenons à 2 ou 4 dixièmes de seconde au tour, nous sommes souvent en pole position, notre équipe de mécaniciens et techniciens est soudée et très bien rodée.

Pour être un bon pilote, il faut savoir bien gérer son stress, dans un environnement très bruyant, au volant d’un bolide qui coûte très cher, cela occasionne beaucoup de tension nerveuse.

Il faut s’entretenir beaucoup physiquement pour être en mesure de rester 1h15 dans la voiture à des températures avoisinant les 50°. C’est un des gros problèmes, il est interdit d’ouvrir les fenêtres. On transpire énormément, il faut savoir garder son calme et sa concentration, on n’est pas seul en cause dans ce sport, il faut gérer aussi l’interface qu’est la voiture.

Donc cela nécessite un entraînement continu, beaucoup de réglages. Il faut être rigoureux et méthodique pour pouvoir conduire à 250 km/h.

On doit savoir pousser la mécanique et l’homme jusqu’aux limites de la rupture.

C’est un sport dangereux, malgré les progrès en matière de sécurité, il y a encore beaucoup d’accidents.

Pourquoi notaire ?

Finalement assez naturellement… Après des études de droit, sans idées préconçues, je me demandais quoi faire.

Bien que fils et petit-fils de notaires, je ne connaissais pas réellement ce métier.

Le fait d’être un juriste généraliste et au contact des personnes me convenait parfaitement. En 1999, je suis devenu notaire assistant dans l’étude paternelle, puis en septembre 2007, je prends sa suite. Mon père ne m’a cependant jamais « mis la pression » pour lui succéder. Je suis heureux dans ce métier, et même si la profession vit une grosse période de crise, je suis confiant dans la capacité d’adaptation du notariat.

Quelles sont les qualités du notaire ?

Le sens de l’écoute, savoir comprendre la demande du client, pour ensuite adapter la réponse, chaque client étant unique.

Savoir les retenir, en effet nos clients ont de plus en plus d’offres de services (l’Uberisation en quelque sorte) via internet. Nous sommes concurrencés par le web, les banques, des sociétés de service, notamment sur les questions de succession sans immobilier, sur la rédaction de certains baux, etc.

Vos qualités de pilote vous aident-elles dans votre profession ?

Pratiquer ce sport me vide la tête et me permet d’évacuer le poids du stress de l’entreprise et des obligations liées à mon métier.

Quand on est compétiteur, on a toujours envie de gagner et de faire mieux.

J’essaie de gérer mon étude comme notre équipe de course, avec rigueur et empathie, afin que chacun donne le meilleur de lui-même.

Le fait d’être connu m’attire plus la sympathie que de nouveaux clients. En effet je fais très attention à ne pas tout mélanger.

Au sein de la profession connaissez-vous d’autres sportifs de haut niveau ? Pensez vous que le sport pourrait être un facteur de cohésion ?

Je ne connais pas vraiment d’autres notaires sportifs de haut niveau, il y a bien entendu beaucoup de mes confrères qui pratiquent un sport.

Effectivement, cela peut être un facteur de cohésion, c’est sans doute le rôle secondaire de la cyclonot ou de la coupe de ski.

Cela étonne toujours qu’un notaire puisse être champion, cela peut contribuer à améliorer l’image un peu désuète et poussive du notaire.

Je n’ai jamais été sollicité par les instances, mais sans doute ne sont-elles pas informées, je ne suis pas vraiment demandeur non plus, mais pourquoi pas, s’il y a une demande dans ce sens…

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Que dire à un jeune notaire ?

C’est un beau métier, il faut « s’accrocher » et rester optimiste dans notre capacité à demeurer. On aura toujours besoin de juristes de proximité et de « médecins des âmes ».

Il est vrai qu’il y a encore des incertitudes sur certains éléments (salaire, concurrence, etc..), mais trop de commentaires pessimistes ont été faits, il faut rester confiant.

Sur ces jolis mots, Maître Guillermin raccroche le téléphone et repart vers de nouvelles aventures.

Propos recueillis par Caroline Lambert

* Champion de France du trophée Tourisme Endurance

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